Ce ne sont pas ses douleurs qui nous font placer le Christ aussi haut dans les airs, aussi profond dans nos cœurs. Ses douleurs sont au contraire ce qu’il a de commun, de charnellement et spirituellement fraternel.
Si nous le distinguons, si nous lui accordons sans réserve les deux royaumes du dessous et du dessus, du tout petit et du très grand, ce n’est pas pour la misère de sa mort (en cela il nous tutoie, il nous ressemble), mais pour la folie de son amour, pour avoir cru et vécu un amour tel que la mort s’est inclinée devant lui.
Cet amour et cette mort se sont cherchés pendant toute la vie du Christ. Ils se sont enfin rencontrés pendant trois jours, pendant les trois jours et les trois nuits que nous rassemblons sous le nom de « Pâques ». Trois jours et trois nuits d’affrontement – jusqu’au matin où la mort a baissé les yeux devant les yeux du Christ. Aveuglée, éblouie.
Croire que l’amour nous ressuscite est folie. Croire que l’amour est plus certain que la mort est folie. C’est pour avoir tenu cette croyance que nous mettons le Christ aussi profond de notre cœur.
. Christian Bobin,
. article paru dans La Croix, mars 1997.